samedi 24 février 2018

Devoir de santé




Je lisais un article dans la Presse de ce matin. Un pauvre gars qui a fait un problème cardiaque, qui est mort 5 fois, qui en est revenu, qui ne prenait pas soin de sa santé, avant, mais qui est maintenant devenu sérieux, qui a perdu du poids, qui surveille son alimentation et son entraînement. Etc. Bien content pour lui. Mais il y a un petit quelque chose qui me fâche, dans cet article. Le devoir de santé, ce n’est pas seulement pour soi, qu’il existe, c’est pour toutes les personnes qui vivent avec nous, qui nous aiment et qui subiront nos insuffisances.

La conjointe de ce type, ses enfants, s’il en a, ses amis, tous ceux pour qui l’aiment subissent présentement ses incapacités. Les mois et les mois de rétablissement ne font pas que le concerner : ce sont tous ceux qui le fréquentent qui subissent ce rétablissement. Leur vie s’est arrêtée, comme la sienne. Ils vivent aujourd’hui avec son nouveau discours. Ils doivent ajuster leurs vies aux changements que ce type impose à sa vie et impose, en même temps et jusqu’à un certain point, à tout son entourage. Il est là, notre devoir de santé. Il est pour nous, bien sûr, mais tout autant par respect pour les personnes qui partagent notre vie.

Peu de choses ces derniers jours. Un spectacle de blues ce soir et une procession demain. En cadeau, la photo de ce petit qui dormait dans une boîte au marché.

Bonne semaine à tous ceux et celles qui me lisent.

mardi 20 février 2018

Le monde comme il est


Je trouve toujours amusant les ethnologues et les anthropologues qui, lorsqu’ils ne comprennent pas un artefact ou un site archéologique s’empressent de l’interpréter en parlant de rites religieux… alors qu’il peut s’agir de n’importe quelle habitude alimentaire ou vestimentaire ou qu’en sait-on…


J’ai tellement vu de tenues vestimentaires et de comportements étranges au cours de mes voyages, notamment en Inde (Ou Trudeau nous en donne présentement une illustration bouffonne en choisissant parmi les vêtements les plus riches) ou les vêtements vont parfois d’une simple bande de tissu en coton à des trucs extrêmement complexes, associés à des rituels laïques ou religieux, la plupart du temps. Le jour où je suis sorti sur la rue en portant une dhoti, j’ai vite compris qu’on  ne peut, comme touriste, se dissimuler  dans la foule en adoptant les vêtements du pays. Les femmes riaient de si bon cœur que je n’ai pas parcouru 100 mètres avant d’aller me changer pour revenir en portant une tenue plus conventionnelle et plus appropriée à mon statut. J’ai compris plus vite que d’autres. De toute façon, en Inde, beaucoup de gens s’habillent sensiblement comme nous, pantalon et chemise. Pas nécessaire de rechercher un mimétisme dont on ne connaît pas toujours la signification.

À la décharge des anthropologues, je me dois d’avouer qu’il est vrai que les rites religieux sont souvent des plus étranges. On a l’habitude de dire que l’Inde est imbattable à ce chapitre, mais je peux vous dire que l’Asie en général est terriblement déstabilisante pour nous. Toutefois, je ne croyais pas que le Guatemala me jetterait par terre.  Ici, à Antigua, je vous en parlais un peu la semaine dernière, la « saison » des processions vient de commencer.

Voyons un peu. Chaque vendredi, jusqu’à Pâques, il y aura, dans chaque église, une nouvelle « alfombra ». L’une de ces églises organisera une « velacion » (à tour de rôle) qui comprendra une « alfombra » plus importante que les autres suivie, le dimanche, par une procession. Une petite procession de plusieurs kilomètres et de nombreuses heures. Les activités sérieuses sont réservées pour la semaine Sainte. Chaque église possède une « hermanadad » que l’on pourrait traduire librement par une confrérie, qui s’occupe d’organiser ces activités.

Un exemple? La procession de San Felipe durera 15 heures. Elle nécessitera plus ou moins 10 0000 porteurs (hommes ou femmes) pour transporter sur leurs épaules une « andaria », cette plate-forme sur laquelle est installée une statue du Christ  et de sa croix de 100 « brazos » (100 porteurs, 50 de chaque côté), porteurs qu’il faut remplacer à chaque coin de rue. Pendant 15 heures, on parle ici, de plus ou moins 10 000 personnes qui ont payé pour faire ce travail. Elles doivent porter le costume de l’église concernée. De plus, il faut un orchestre dirigée par un chef avec baguette et de multiples personnages en tenues diversifiées. Cette semaine, nous avons vu des romains dont le casque de centurion était fait de brosses à plancher. La procession de l’Escuela de Christo se tient la même journée que la procession de San Felipe. Les deux sont en compétition, année après année. Je crois, et j’espère ne pas me tromper, que celle de l’Escuela de Christo ne compte que 80 « brazos » pour son andaria et dure moins de 15 heures. Mais on dit que cette « hermanadad » de l’escuela de Christo est la plus riche. Pendant toutes les processions, les rues sont couvertes d’alfombras.
Ici, sur notre rue, 5 processions passeront pendant la semaine Sainte. Notre proprio ne fera que 4 alfombras, parce que l’une d’entre elle passe à minuit. À cette heure, la décoration de la rue ne sert plus à rien.

Un autre exemple : l’église de la Merced. Le vendredi 24 mars, l’alfombra de la velacion du jour est prêt pour 6h. Cette velacion se terminera vers 23h. Le dimanche des Rameaux (26 mars), à 5h du matin, une procession (je vous épargne le nom des processions) simule l’arrivée de Jésus sur une mule. Elle arrive à la Merced à 7h. À 9h, la procession des Rameaux part de la Merced. Elle ne reviendra qu’à 23 heures.  (Je vous épargne la description des tâches de l’hermanadad pendant toutes la semaine) Le lundi, il y a une nouvelle alfombra pour la velacion de la Vierge. Mercredi, la procession Infantil, de 14 à 18h. L’andaria est porté par des enfants. Jeudi, le Sagrario. Jeudi, à minuit, La Sentencia. Des hérauts à cheval parcourent la ville jusqu’à 3h, pour annoncer que le Christ est condamné à la crucifixion. Vendredi, 3h du matin débute la procession du Vendredi Saint. Elle reviendra à la Merced à 15h.

En plus des activités de la Merced, il y aura quatre ou cinq autres processions au cours de la semaine. Le dimanche de Pâques, la Merced fait relâche, mais la ville comptera pas moins de 6 processions qui s’entrecroiseront à travers ses rues.

Voilà!

mercredi 14 février 2018

Velacion






C’est la période des Vigiles, qui vient de commencer, avec ce Mercredi des Cendres qui tombe, cette année le même jour que la St-Valentin. Deux fêtes apparemment incompatibles qui ne semblent pas déranger les guatémaltèques : on vend des roses à tous les coins de rue, du chocolat dans toutes les grandes épiceries, des gâteaux dans les « panaderias »…et dans les églises, on commence les « Velacions ».

Les vélacions, ce sont des Vigiles : une journée chaque semaine, le vendredi, pendant laquelle on prépare une « alfombra », c’est-à-dire un tapis décoratif, de fruits, de légumes, de fleurs et de fin bran de scie coloré. On crée des motifs et pendant toute la journée, les fidèles viennent prier. Chaque église a ses spécialistes, ses techniques et ses motifs. Magnifique. Chaque église rivalise pour créer l’œuvre la plus belle. On sort les statues qui illustrent le chemin de croix du Christ, souvent grandeur nature et qui ne lésinent pas sur le sang et les blessures. Impressionnant.
 
Sur la rue voisine de la nôtre, toutes les maisons des catholiques seront décorées de tissus mauves chaque vendredi du Carème. Les fidèles circuleront d’une maison à l’autre en priant et en encensant sur leur passage.



Lors de la semaine Sainte, ce sont, nous dit-on, des rues complètes qui seront décorées de tapis « alfombras » pour le passage des grandes processions.


Dimanche prochain : grande procession

vendredi 9 février 2018

Irma et ses fleurs


 
 Irma a 6 enfants. Bien assez, dit-elle, d’autant plus que la moitié sont divorcés, que c’est compliqué pour les petits enfants, etc. Pourtant, tous les dimanches, ils viennent passer la journée avec elle,  soupent ensemble,  jouent aux cartes pendant que les chiens arpentent la cour. Une famille bien soudée.

Chaque matin, à 6h, elle commence l’arrosage de ses fleurs. Elle en a des dizaines d’espèces différentes, dont elle est très fière. Elle peut vous expliquer quand et pourquoi elle a choisi chacune d’entre elles. La plupart me sont inconnues. Je repère bien sûr les roses, les orchidées, les poinsettias, mais après, je m’y perds rapidement, d’autant, qu’on découvre des nouveautés chaque jour… suffit de faire le tour de la cour pour qu’une nouvelle espèce nous épate soudainement.  

C’est son passe-temps principal. Comme elle est la propriétaire de notre petit complexe, qui comprend au moins 8 logis différents elle se fait aider pour le ménage et le jardinage. Ce qui ne l’empêche pas d’étendre son linge sur la corde plus souvent qu’à son tour. Elle me disait, d’ailleurs, qu’elle aimerait bien du linge à usage unique.

Lorsque nous sommes arrivés ici, la bouteille de propane de notre logis était vide. Une bouteille de 25 livres. Avant même que je puisse réagir, elle l’a débranchée, l’a sortie de sous son abri, a traversée toute la cour en la tenant à bout de bras. Elle s’apprêtait à soulever la bouteille pleine lorsque je me suis élancé pour m’en emparer.

Elle a 82 ans, en paraît 72, active, dynamique, souriante, curieuse de ce qu’on fait, de comment on vit, chez nous. Elle n’arrête pas. « La retraite, nous a-t-elle dit lorsqu’on lui a dit qu’on ne travaillait plus, ce n’est pas pour moi. »

vendredi 2 février 2018

Dans un volcan près de chez nous



Voilà! Le Fuego, à quelques kilomètres d’ici, a fait un gros feu de cheminée, cette semaine. L’une de nos enseignantes est arrivée le matin en nous parlant de ses coulées de lave qu’elle avait regardé à 5h du matin, à l’ouverture de sa tienda. Nous, on dormait, bien sûr. On a manqué une bonne partie des expectorations, mais aujourd’hui, il semble que le ménage est fait, que tout est revenu au calme et que les villages plus près du volcan peuvent se détendre un peu. L’alerte est passée.

Vendredi, nous avons reçu à diner nos deux enseignantes d’espagnol ainsi qu’un torontois qui s’est fait construire une maison ici pour y passer le reste de sa vie, mais qui se demande s’il ne la revendra pas d’ici quelques années. Il y est seul, il est peu actif et il s’ennuie. Repas fort agréable, tout en espagnol, de la pédagogie par projet, bien arrosée, avec, pour terminer la journée, un cours de Salsa donné par l’une de nos enseignante qui a été maestra de Salsa pendant dix ans.